Il est temps de parler du pétrole. Oui et encore pour un long moment.
Entre les craintes d’une récession et la pénurie d’offre, le pétrole ne sait pas sur quel pied danser. Une partie de mes portefeuilles est investie dans cette énergie si importante pour l’économie. En 2022, le secteur de l’énergie a connu un excellent parcours boursier suivi d’une année 2023 morose. À présent en 2024, il est en dehors des radars du marché. La thématique de l’IA (Intelligence artificielle) emporte tout sur son passage.
Pourtant, la majorité des actions pétrolières sont rentables et vous offrent un rendement pouvant lutter efficacement contre l’inflation. Sans compter qu’elles sont sous-évaluées. Si les fondamentaux demeurent solides, l’aspect graphique montre potentiellement que le cours du BRENT (Pétrole de référence pour l’Europe, l’Afrique, le Moyen-Orient) ait atteint un creux de marché.
Dans cet article, je vous explique pourquoi je suis bullish sur le pétrole. Le moins que je puisse vous dire est que nous allons rester sur une période de prix élevés pour un tas de raisons. Et après ça, je vous déroule le tapis rouge avec 3 actions favorites du secteur à détenir en portefeuille.
Pourquoi les prix du pétrole vont rester élevés pendant un bon moment
Si l’OPEP n’a pas bougé pas d’un iota sur la réduction de ses quotas de production, les États-Unis, au contraire, viennent de réaliser un nouveau record de production de pétrole à 12 933 Barils/Jour en 2023. Ce qui contribue à doper l’offre face à la demande au niveau mondial.
Cela s’explique par des puits de schiste qui produisent à des taux élevés au départ, mais diminuent plus rapidement que les années précédentes. Ce qui veut dire qu’un puits de schiste se met facilement en route pour sortir du pétrole, mais perd sa capacité de production au bout de plusieurs mois d’utilisation.
Le pétrole de schiste représente 68 % de la production aux États-Unis, tandis que le pétrole conventionnel reste stable à 32 % et n’a pas évolué à la hausse depuis une quinzaine d’année. Toutefois, le Bassin Permien est la zone de pétrole de schiste qui a vu sa production repasser au-dessus des niveaux d’avant-Covid.
Si le pétrole de schiste baisse, la production américaine baisse. En 2024, rien ne dit qu’elle augmentera à nouveau. D’autant qu’on peut se demander si la hausse de production en 2023 a été motivée par la Maison Blanche sous l’ère Biden qui tente par tous les moyens d’atténuer les pressions inflationnistes.
Comme les zones de pétrole de schiste de qualité ont été majoritairement exploitées, les entreprises pétrolières cotées en Bourse feront en sorte d’être prudentes, lorsqu’il s’agira d’augmenter la production, et donc protéger leurs cash flow futurs. L’OPEP sait que c’est le talon d’Achille des États-Unis.
La deuxième raison qui pousse à être bullish sur le pétrole est liée à la volonté des décideurs politiques de faire une transition énergétique forcée en faveur des énergies renouvelables. Ce qui rend l’accès aux financements externes compliqué pour les entreprises pétrolières, mais entraîne un manque de CAPEX (Dépenses d’investissement) dans les années futures. Si on la combine avec une demande mondiale de pétrole prévue à la hausse jusqu’en 2028, nous risquerions d’avoir un pénurie d’offre pouvant conduire à des prix du pétrole élevés et surtout une crise énergétique qui ne dit pas son nom.
Troisième raison d’être positif sur le pétrole. Il y a progressivement des signes de réaccélération économique. L’immobilier commercial et le secteur manufacturier montrent des signes de stabilisation après des années 2022 et 2023 ternes. D’autre part, les ISM Manufacturiers se redressent petit à petit.
Les prix de l’énergie dépendent de l’offre et de la demande. L’offre est influencée par les tendances dans le secteur, les décisions de l’OPEP+ et l’approvisionnement. La demande, quant à elle, est étroitement liée à la santé de l’économie mondiale, notamment en ce qui concerne les fluctuations économiques.
Dernière raison. Investit dans le pétrole constitue une bonne protection contre l’inflation, si celle-ci venait à perdurer. Auquel cas, ce qui est rare devient précieux, et donc très convoité par les investisseurs.
Pour profiter d’une demande mondiale du pétrole qui devrait rester soutenu jusqu’à la fin de la décennie 2020, voici 3 actions favorites à détenir en fond de portefeuille.
Action #3 : Devon Energy
Devon Energy (DVN) est une entreprise indépendante d’exploration et production de pétrole et gaz aux États-Unis. Elle est essentiellement focalisée sur les gisements onshore, c’est-à-dire « sur terre ». En 2023, DVN a vu sa production de pétrole augmenter de 8 % 658 MBoe/d, mais les cours défavorables du pétrole ont entraîné une baisse mécanique de ses revenus et son BPA (Bénéfice par action). Ce qui reste néanmoins plus élevé que les résultats annuels 2021.
La bonne nouvelle est que DVN parvient à se désendetter pour offrir un retour sur investissement pour les actionnaires à travers des programmes de rachats d’actions et de dividendes. D’une part, son bilan financier devient solide avec une dette nette/EBITDA à 0,7 et une réserve de trésorerie de 875 millions de dollars. D’autre part, son free cash flow ressort positivement pour le quatorzième trimestre consécutive.
Avec un payout ratio proche de 50 %, DVN a largement la capacité d’augmenter son dividende. D’ailleurs, l’entreprise vient d’annoncer un dividende trimestriel en hausse de 10 % à 0,22$ par action. En cas d’excès de free cash flow, elle pourrait vous proposer en supplément un dividende variable.
Bien que l’entreprise soit sensible à l’évolution des cours du pétrole en opérant dans la phase amont de la chaîne de production, investir dans DVN se révélerait lucratif avec un free cash flow yield important, c’est-à-dire que l’entreprise génère suffisamment de cash flow pour payer des dividendes et rembourser sa dette à partir d’un prix du pétrole WTI à 65$. D’autant plus que son point d’équilibre se situe à 45$ le baril.
Pour ce qui est de la valorisation, l’action DVN se traite sur un Forward P/E ratio à 8,8 avec des fondamentaux qui se redressent bien depuis les points bas de la crise Covid.
Action #2 : TotalEnergies
TotalEnergies (TTE) s’engage durablement dans la transition énergétique, mais il est important de ne pas exagérer en parlant d’un changement complet de cap. Les revenus générés par l’exploitation pétrolière contribuent au financement des investissements dans les énergies renouvelables. La société a pris des mesures proactives en acquérant des entreprises telles que Saft, Lampiris, SunPower et Maxeon Solar Technologies, renforçant ainsi sa présence dans les batteries électriques, la distribution d’électricité et l’énergie solaire. Les chiffres témoignent de son engagement, avec une augmentation des capacités de production d’énergies renouvelables, passant de 47 GW au T4 2022 à 70 GW au T1 2023.
En plus de sa stratégie axée sur les énergies renouvelables, TotalEnergies s’investit également dans le Gaz Naturel Liquéfié (GNL), se positionnant comme le troisième acteur mondial avec des participations dans divers projets mondiaux. La demande de GNL devrait croître de manière significative jusqu’en 2040, et avec des perspectives favorables en termes d’offre et de demande, on peut s’attendre à une augmentation des capacités de production à moyen-long terme.
Les performances financières de TotalEnergies sur la période 2019-2023 sont honorables, avec une croissance du chiffre d’affaires et des bénéfices de 5,6 % et 19,6 % respectivement. Avec un ROE de 18,3 %, l’entreprise dispose d’une solide assise financière, offrant la possibilité d’augmenter les dividendes, racheter des actions et investir davantage dans la transition énergétique. Les indicateurs financiers tels que la dette/EBITDA à 0,4, le payout ratio sous les 50 % et le point mort cash organique à 25 $ le baril renforcent la stabilité financière de TotalEnergies.
Pour ce qui est de la valorisation, l’action TTE se traite sur un Forward P/E ratio à 7,1 pour un rendement de 4,8 %, bien que les cours ne sont pas si éloignés de ses plus hauts historiques. Ce qui reste bon marché avec des fondamentaux qui tiennent largement la route.
Action #1 : Schlumberger
La montée en puissance de l’ESG et de l’ISR ne semble pas éloigner les investisseurs du secteur pétrolier et gaz, contrairement à ce que l’on aurait pu penser. En réalité, ce sont les énergies renouvelables qui rencontrent des difficultés en raison des taux d’intérêt élevés. La transition des énergies fossiles vers les énergies renouvelables s’avère plus complexe que prévu, notamment en raison de leur densité énergétique insuffisante pour compenser le déficit de production.
C’est ici que les entreprises parapétrolières, malgré leur reprise depuis les points bas du Covid, restent sous-évaluées. Schlumberger (SLB) attire particulièrement mon attention, selon Goldman Sachs, qui estime que tout le secteur a besoin d’un coup de pouce en termes d’investissement. La préférence actuelle pour l’optimisation du free cash flow plutôt que l’expansion de la production et la sauvegarde des ressources joue en faveur de ces entreprises.
Bien que la demande de pétrole ait dépassé les niveaux d’avant-Covid et que l’industrie souffre d’un sous-investissement depuis 2014, Schlumberger pourrait bénéficier de la dure réalité des conséquences de la transition énergétique. Avec une tendance haussière depuis fin 2020 et une restructuration des coûts au milieu de la décennie 2010, Schlumberger a affiché des bénéfices solides et en hausse pour la troisième année consécutive, avec une croissance annuelle d’environ 10 %.
En scrutant les performances en 2023, on constate une puissance qui se propage à tous les niveaux, avec une croissance remarquable là où cela compte le plus. Tous les indicateurs sont au vert, mise à part le « Digital & Integration ». Mieux encore, les zones géographiques où l’entreprise est présente, voient leurs revenus progresser.
Grâce à une gestion rigoureuse des dépenses d’investissement et une amélioration du cash flow opérationnel, Schlumberger a pu maintenir un dividende en croissance depuis 2021, avec même la possibilité de l’augmenter davantage en raison d’une dette nette/EBITDA à 1,2 et d’un taux de couverture des intérêts à 10,9.
Pour ce qui est de la valorisation, l’action SLB se traite sur un Forward P/E ratio à 14,2. Ce qui reste bon marché par rapport à la moyenne des 5 dernières années.
Conclusion
Globalement, en plus d’avoir des fondamentaux solides en termes d’investissement axé sur la valeur, les entreprises du secteur de l’énergie sont actuellement perçues comme des remparts positifs contre les risques extrêmes émergents. Les grandes entreprises énergétiques affichent une rentabilité à des niveaux actuels de prix du pétrole et récompensent les investisseurs, mais elles pourraient également connaître une forte croissance si les prix de l’énergie augmentent considérablement, ce qui pourrait menacer d’autres actifs de leur portefeuille. En d’autres termes, investir dans ces entreprises pourrait offrir une protection tout en générant des rendements positifs face à ces risques potentiels. Pour toutes ces raisons, voilà pourquoi je suis haussier sur le pétrole.